Les limites de la mondialisation et du flux tendu

Le « Just in time », en français « flux tendu », est un système de gestion des entreprises qui consiste un produire un maximum en disposant d’un minimum de stock de pièces détachées. Au départ, l’idée ne paraissait pas sotte. Elle évitait de devoir disposer d’emplacements de stockage plus ou moins onéreux et surtout de voir des investissements gelés dans des stocks dont on ne savait pas toujours quand on allait pouvoir s’en servir.

Ce système avait néanmoins ses inconvénients. En cas de surchauffe, était-on certain que les sous-traitants allaient pouvoir suivre et répondre à une soudaine hausse de production ? Quid en cas de faillite d’un fournisseur ?

Tant que les sous-traitants n’étaient pas trop éloignés des lieux de production où ils devaient livrer leurs marchandises, ce système pouvait fonctionner harmonieusement. Toutefois, la moindre anicroche dans la chaîne de production pouvait évidemment avoir des conséquences sur l’ensemble de la production.

Avec l’apparition de la mondialisation, un grand nombre de producteurs se sont tournés vers des pays où la main d’œuvre était moins onéreuse. Mais, ce faisant, ils allongeaient les lignes de transfert des pièces détachées et augmentaient concomitamment le temps nécessaire pour les approvisionnements. Fragilisant d’autant le maintien d’une production stable.

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Ensuite, on passa au stade suivant : produire directement dans les pays tiers. Créant ainsi une dépendance que l’actuelle crise de coronavirus vient de mettre dramatiquement en lumière. De surcroît, cette manière de travailler a généré de nombreuses pertes d’emplois. Les personnes licenciées dans le cadre de telles opérations étant souvent faiblement formées, il leur était difficile (si pas impossible) de retrouver un emploi. Comme, en même temps, se développait la numérisation et la robotisation, grandes destructrices d’emplois basiques, il ne fallait pas être grand devin pour prévoir que l’on allait finir par être confronté à un chômage incompressible. Surtout que l’on ne se trouvait pas devant une « destruction créatrice », telle que l’a définie l’économiste autrichien Schumpeter, au siècle dernier, puisque les nouveaux emplois crées dans le cadre de l’informatisation étaient moins nombreux que ceux détruits et demandaient des personnels plus qualifiés.  Il s’est dès lors vite avéré impossible de reconvertir dans les nouvelles technologies le plus grand nombre des travailleurs licenciés.

Rapatrier les productions vitales

La crise du coronavirus a montré à quel point, pour des produits liés à la santé, les délocalisations se sont avérées dangereuses. Commander des masques vitaux (dans le sens étymologique du mot) à des sociétés turques plus ou moins véreuses, essayer de se fournir en Chine quand ce pays produit à peine assez pour préserver sa propre population, a montré les limites de ce système.

S’il ne faut pas rejeter toute la mondialisation qui a apporté le bien-être à des millions de gens et permis au plus grand nombre d’atteindre un niveau de vie inespéré par la baisse des prix de nombreux produits, il convient aussi d’être sélectif. Et donc de rapatrier les productions vitales. Quitte pour ce faire à accorder des avantages fiscaux et sociaux aux industries qui franchiraient ce pas. De plus, cela créerait des emplois.

Car maintenant plus personne ne peut contester que si une rupture en approvisionnement en jeans n’est guère  gênante, manquer de masques sanitaires ou de gels désinfectants tue.

J.O.